Avec son nouveau roman, Éric Bonnargent dresse le tendre portrait d’une vie ordinaire

Professeur de philosophie au lycée Talma depuis 2015, Éric Bonnargent est aussi l’auteur de quatre ouvrages, dont le dernier, Les Désarrois du professeur Mittelmann, vient de paraître aux Éditions du Sonneur. Un livre sur le temps qui passe et les rêves déçus, au cœur d’un Brunoy historique, oscillant entre les sombres événements de son passé et le quotidien de ses salles de classe.

Huit ans après Le Roman de Bolaño coécrit avec Gilles Marchand, Éric Bonnargent revient cette fois-ci en solo pour retracer avec tendresse la vie déceptive de Mittelmann (homme médiocre en allemand). Originaire de Lorraine, ce jeune professeur de philosophie retraité fait le terrible constat d’être passé à côté de sa vie et de ne pas avoir été à la hauteur de ses ambitions littéraires.

Un livre qui reflète la condition de l’homme moderne aux rêves insatisfaits, mais qui n’en fait pas pour autant un ouvrage pessimiste. « Je ne voulais pas un livre houellebecquien ou nihiliste » nous explique l’auteur. « Ce que je voulais, c’était donner à Mittelmann un côté franchement humain, parce que même s’il a une sorte de misanthropie et de cynisme de façade, on voit dans ses rapports aux élèves que c’est quelqu’un avec beaucoup d’humanité, qui est à l’écoute et qui essaie d’être là pour eux. On le voit également dans ses relations, c’est quelqu’un qui, je crois, n’aime pas les gens en général, mais aime les autres en particulier. »

Si sur le plan de ses aspirations littéraires, le bilan s’annonce décevant, Mittelmann aura tout de même « réussi là où il n’avait pas voulu réussir » : en tant que professeur de philosophie au lycée Talma, à Brunoy. En témoignent les trois épisodes de cours, étalés sur 30 ans d’enseignement, que l’on découvre, sur fond grisé, au fil des pages. « Il y a beaucoup de livres qui parlent de l’Éducation nationale ou qui ont des professeurs comme personnages, mais dans tout ce que j’ai lu, il n’y a jamais de séance de cours. Je voulais montrer ce que c’était que faire cours, la difficulté qu’il y a à avoir un discours suivi, notamment à cause de l’interaction permanente et pas toujours à propos avec les élèves.  Mettre en lumière l’évolution de l’attitude des élèves, de  leur niveau. » reprend Éric Bonnargent.

« Ce livre, c’est aussi un livre sur le vieillissement et vieillir, c’est devenir peu à peu étranger au monde dans lequel on vit, parce que les valeurs changent ; vieillir, c’est un peu perdre pied finalement. Et si le métier de professeur nous permet de ne pas être coupé de cette jeunesse, au fil des années, les références et les codes ne sont plus les mêmes. » Un sujet que connaît bien l’auteur, lui même enseignant dans le même établissement que son personnage.

L’enseignement « un métier qui a du sens »

Des ambitions littéraires au métier de professeur de philosophie dans la ville de Brunoy, les similitudes entre l’auteur et son personnage ne se poursuivent pas pour autant. « Je ne me reconnais pas dans le personnage de Mittelmann, qui est plutôt noir et déprimé » explique-t-il. « Je voulais parler d’une ville de banlieue parisienne et Brunoy était très intéressante de par son histoire, c’est comme cela que les rapprochements sont apparus ». À travers l’ouvrage, on y découvre un Brunoy tout aussi sombre, teinté d’anecdotes historiques loufoques, allant jusqu’aux extravagances de la famille Monmartel et de son fantasque Marquis, aussi fou que philanthrope.

Originaire du Val de Marne, l’écrivain a lui-même habité Brunoy dans sa jeunesse et côtoyé les salles de classe du collège Camus ainsi que du lycée Talma, où il enseigne aujourd’hui. Un hasard de la vie, d’autant que rien ne le prédestinait à enseigner. « J’étais un élève en difficulté et n’aimais pas particulièrement les livres. C’est un professeur de français qui m’a fait aimer la littérature » se souvient-il. « J‘ai trouvé qu’on pouvait avoir un rôle important pour changer le regard de jeunes gens sur la vie, sur les livres, sur tellement de choses. J’ai trouvé que c’était un métier qui avait du sens. »

Depuis la parution de l’ouvrage, beaucoup de ses élèves ont souhaité découvrir l’histoire du professeur Mittelmann. Un hommage attendrissant pour l’enseignant : « Ça s’est toujours très bien passé avec mes élèves, j’en revois un certain nombre. Les plus anciens sont aujourd’hui parents. Beaucoup ont même fait le déplacement à Paris, pour la soirée de lancement. C’était vraiment très touchant » confie-t-il.

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